Le ministre de la Santé Amine Tahraoui sort de son silence. Dans un entretien accordé à Hespress, il répond point par point aux récentes polémiques qui secouent son département. En ligne de mire : les marchés publics, les conditions de sous-traitance dans les hôpitaux et la stratégie face à la flambée des cas de rougeole.
Marchés publics : vers un ménage en profondeur
Interrogé sur les contrats liés à la sécurité et au nettoyage dans les établissements de santé, le ministre assure qu'« aucun marché n’a été annulé ». En revanche, une révision des cahiers des charges est en cours, avec un mot d’ordre : garantir des prestations dignes des attentes des patients.
Objectif : encadrer davantage la qualité de service et imposer aux entreprises sous contrat le respect du salaire minimum. « Certains agents ne perçoivent même pas leur salaire de base. C’est inacceptable », tranche-t-il.
Quant à la rumeur d'instructions envoyées par SMS aux directions hospitalières, Tahraoui dément catégoriquement. Il évoque plutôt une communication formelle avec les responsables régionaux, et affirme que « si de tels messages avaient existé, les entreprises auraient réagi ».
Le marché des 180 millions de dirhams abandonné
Autre sujet brûlant : l’abandon du projet de numérisation des dossiers médicaux, estimé à 180 millions de dirhams. Le ministre défend une décision « rationnelle et stratégique », expliquant que le projet, lancé sous son prédécesseur, aurait engendré la gestion parallèle de quatre systèmes informatiques.
La nouvelle feuille de route privilégie une coordination avec la CNSS, pour une intégration fluide et une économie budgétaire. « Nous n’avons plus besoin de ce marché. Nous allons allouer 20 millions de dirhams à la CNSS pour harmoniser les bases de données », affirme-t-il.
Sur les soupçons de favoritisme envers des entreprises étrangères, le ministre balaie les critiques : « Nous privilégions les compétences nationales. »
Rougeole : la troisième vague frappe fort
Mais c’est sur le terrain sanitaire que l’alerte est la plus urgente. Depuis la mi-octobre, le Maroc fait face à une troisième vague de rougeole. Le virus, extrêmement contagieux, « peut toucher entre 12 et 18 personnes à partir d’un seul malade », rappelle Tahraoui.
Le recul des campagnes vaccinales post-Covid et la défiance croissante envers les vaccins ont favorisé cette résurgence. Résultat : 1 520 cas hebdomadaires, 4 décès en une semaine, et 15,2 % des enfants encore non vaccinés ou en retard sur leur seconde dose.
Face à ce constat, les autorités ont lancé une campagne de vaccination renforcée ciblant les moins de 18 ans. L’objectif est de porter la couverture à 95 %, contre 62 % actuellement. Le dispositif s’appuie sur les établissements scolaires et un stock renforcé de cinq millions de doses de vitamine A.
Pas de vaccination obligatoire pour l’instant, mais une exhortation claire : « Le vaccin reste la seule protection. Il en va de la responsabilité des parents », insiste le ministre.